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Article 18

Professions non salariées

Les Etats contractants accorderont aux réfugiés se trouvant régulièrement sur leur territoire le traitement aussi favorable que possible et en tout cas un traitement non moins favorable que celui accordé dans les mêmes circonstances aux étrangers en général, en ce qui concerne l'exercice d'une profession non salariée dans l'agriculture, l'industrie, l'artisanat et le commerce, ainsi que la création de sociétés commerciales et industrielles.

Commentaire

Auteur : Aurélie Boulestin, doctorante, CRDEI, Université de Bordeaux
Date de publication : Mars 2016

Situé au cœur du IIIème chapitre consacré aux emplois lucratifs, après les dispositions générales du chapitre Ier et la condition juridique des réfugiés au chapitre II, l’article 18 a trait aux professions non salariées. Les dispositions relatives à l’exercice de ces activités sont héritées de l’article 13 des travaux préparatoires de la Convention. Le droit d’exercer une profession non salariée n’a pas été abordé dans les textes antérieurs1. Par ailleurs, il est intéressant de relever que les dispositions introductives de l’article 19 relatif aux professions libérales ont été calquées sur celles de l’article 18, laissant présumer des éléments communs dans leurs régimes juridiques.
L’insertion de ces dispositions spécifiques à l’article 18 au bénéfice des réfugiés est motivée par le fait que l’exercice de nombreuses activités professionnelles demeure réservé aux nationaux ou est strictement encadré pour les étrangers dans certains États. L’insertion professionnelle des réfugiés reste « un défi à relever »2 à coté de deux autres piliers fondamentaux : l’accès au logement et la garantie de l’égalité des chances.
A travers le présent commentaire, il s’agit essentiellement d’expliciter les dispositions de l’article 18 sur la base de la Convention elle-même, mais également par renvoi au droit interne puisque la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés est un traité international que les États signataires doivent ratifier et appliquer dans leurs systèmes juridiques respectifs3. A cet égard, le sens à donner à l’expression « les États contractants » ne doit pas être confondu avec une autre formule à laquelle il est fait régulièrement référence dans les traités : « les Hautes Parties contractantes ». Cette dernière formule désigne les États à l’égard desquels les traités sont en vigueur. A contrario, et conformément à l’article 2 §1, alinéa f de la Convention de Vienne sur le droit des Traités du 23 mai 1969, l’expression « États contractants » couvre les « État(s) qui (ont) consenti à être lié(s) par (la Convention de Genève), que la (Convention) soit entrée en vigueur ou non ». L’entrée en vigueur de la Convention amorce ensuite l’obligation pour les États de l’appliquer de bonne foi conformément à l’une des règles fondamentales d’origine coutumière du droit international précisée à l’article 26 de la même Convention de Vienne, rencontrée souvent sous la dénomination latine « pacta sunt servanda »4. Si le recours au verbe « accorder » recouvre une dimension peut-être moins solennelle qu’une autre formule consacrée couramment dans les traités : (« les États contractants s’engagent »), les prérogatives des États ne s’identifient pas pour autant à une compétence discrétionnaire car ils ont ont la responsabilité de faire prévaloir cette protection des droits professionnels des réfugiés dans leur ordre interne : « There is not a discretionary provision but a binding treaty obligation »5.
La Convention de Genève présente l’intérêt d’être le 1er instrument juridique ayant une valeur universelle exclusivement consacré au statut des réfugiés et leur reconnaît à la fois des devoirs et des droits, à l’instar du droit fondamental au travail6. L’exercice d’une activité non salariée tel que précisé à l’article 18 est subordonné à l’effectivité de la reconnaissance préalable de la qualité de « réfugié »7. Par commodité de langage, il est couramment fait référence aux « réfugiés » ; nonobstant,  il est nécessaire de préciser cette terminologie juridique afin d’éviter toute confusion avec les demandeurs d’asile,  « les réfugiés en puissance »8, ou encore les candidats réfugiés9. A l’article 18, sont visés les réfugiés statutaires, c’est-à-dire ceux dont cette qualité a été reconnue à l’issue du dépôt d’une demande d’asile10.
Le statut de réfugié peut être délivré sur différents fondements11. Dans la perspective du commentaire de l’article 18, nous retiendrons ici seulement le fondement conventionnel défini à l’article 1er, section A, paragraphe 2, premier alinéa, de la Convention de Genève12.
De la même façon que le modus operandi de la reconnaissance de la qualité de réfugié est laissé à la compétence du droit étatique, la condition des étrangers est elle aussi une prérogative du droit national13.
Le principe gouvernant traditionnellement l’interprétation des textes relatifs à la protection des droits et libertés telle que la Convention de Genève du 28 juillet 1951 est celui d’une interprétation téléologique afin de garantir une protection maximale. Aussi, la problématique qui aiguise l’intérêt de ce commentaire s’oriente sur le fait de savoir si dans le domaine de l’exercice d’une activité non salariée, le traitement réservé au réfugié correspond au minimum à celui reconnu aux étrangers de droit commun ;  ou bien, si le traitement du réfugié envisagé comme un étranger « bénéficiaire d’une protection internationale »14 est plus favorable en se rapprochant des droits des nationaux.
Après ces différentes remarques préliminaires, nous allons revenir sur les points de droit qui méritent quelques compléments et nous permettront de mieux saisir la portée de l’article 18. Deux axes seront privilégiés. Le premier est la sujétion de l’exercice des professions non salariées à la régularité du séjour, un traitement sui generis des étrangers bénéficiaires d’une protection internationale (I). Le second est la jouissance de l’exercice des professions non salariées : un traitement favorable non constitutif d’une assimilation des étrangers bénéficiaires d’une protection internationale (II).

I – La sujétion de l’exercice des professions non salariées à la régularité du séjour : un traitement sui generis des étrangers bénéficiaires d’une protection internationale

Comme les rédacteurs de l’article 18 nous y invitent, pour appréhender le régime juridique applicable à l’exercice d’une profession non salariée par les réfugiés, il faut raisonner par analogie avec le « droit des étrangers en général ». Il s’agit donc d’une application du droit international des réfugiés par emprunt au droit des étrangers15. La summa divisio entre les nationaux et les « étrangers » se fonde sur une approche négative. Est étranger celui qui n’a pas la nationalité de l’État où il se trouve16. En résulte pour cette catégorie juridique un régime propre qui ne saurait être appliqué aux personnes qui ont la nationalité du pays où ils résident. La notion d’ « étranger » a souvent été amalgamée avec celle d’ennemi sur lequel pèse « le perpétuel soupçon […] quand il entend exercer un droit »17. Par conséquent, le renvoi opéré par les dispositions de l’article 18 « au droit des étrangers en général » peut attirer l’attention. N’est–il pas à craindre une hypothèque de la protection réservée par le droit des réfugiés tel qu’il ressort de la Convention lorsque le droit des étrangers se présente lato sensu comme un droit de contrôle flirtant avec un droit de restriction ? Si la finalité officielle de l’article 18 est de garantir un standard international protecteur des réfugiés (« une fonction liberté »18), le but également poursuivi est bien de ne pas accentuer les inégalités de traitement fondées sur la nationalité (« une fonction (non) discriminante »19). L’extranéité aboutit à un régime des étrangers moins favorable que celui des nationaux donnant ainsi tout son sens à la portée et au sens de la notion de nationalité. Cette inégalité de traitement entre les étrangers et les nationaux ne constitue pas pour autant une « discrimination condamnable » dès lors qu’elle se fonde sur des critères objectifs. Il s’agit seulement d’une discrimination tolérée. Ce que l’on prend le parti de nommer ici la « discrimination condamnable » est prohibée dans plusieurs instruments juridiques20, y compris dans la Convention de Genève21 dont est extrait l’article soumis au présent commentaire. « L’idée que l’étranger est un être humain qui mérite un traitement équitable au même titre que les citoyens nationaux ne s’est imposée que très progressivement »22.
En s’intéressant de plus près à la condition des étrangers, force est de constater une kyrielle de statuts : « certains étrangers sont moins étrangers que d’autres »23. La coexistence de différents statuts complexifie l’identification des régimes juridiques applicables. Rappelons brièvement qu’un statut peut être défini comme un ensemble de règles applicables à une catégorie de personnes. Les sujets du « droit des étrangers en général » sont distinctement envisagés entre le droit interne et le droit communautaire. Il est d’ailleurs intéressant de remarquer que la définition à l’article 1er de la Convention d’application de l’accord de Schengen du 19 juin 1985 rejette le qualificatif « étranger » et lui préfère : « toute personne autre que les ressortissants des États membres des communautés européennes ». Depuis le Traité d’Amsterdam de 1997, le droit de l’Union européenne opère une distinction entre les « ressortissants des États membres de l’Union européenne » et les « ressortissants d’un pays tiers », « les étrangers de l’extérieur »24. La définition de l’ « étranger », soit le ressortissant d’un pays tiers, est assez symptomatique de la conception romaine de la citoyenneté, en excluant le « non-citoyen européen »25. Le droit interne distingue quant à lui entre les étrangers de droit commun, les étrangers stricto sensu et les étrangers privilégiés, c’est-à-dire les ressortissants de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen26. Le terme « privilégiés » signifie que le régime juridique applicable aux ressortissants communautaires se rapproche étroitement de celui des nationaux, convergeant vers une égalité de traitement. Reste à déterminer si les réfugiés, amarrés à la catégorie des étrangers stricto sensu, jouissent d’une égalité de traitement avec les autres étrangers appartenant à cette catégorie d’une part et avec les nationaux d’autre part.
Les dispositions de l’article 18 consacrant le droit d’exercer une profession non salariée pour les réfugiés portent en germe une condition : une résidence régulière sur le territoire. Cette formalité n’a rien de surprenant puisqu’aucune norme ne confère aux étrangers un droit général et absolu d’accès et de séjour sur le territoire national. A priori, il ne semble pas qu’un doute puisse subsister sur le sens à donner à la formule « se trouvant régulièrement sur le territoire ». Elle peut être interprétée comme la condition relative à la régularité de l’entrée et du séjour sur le territoire préalable à l’obtention d’un travail. Toutefois, en comparant la formule retenue dans l’article 18 par rapport à celles contenues dans les articles 17 et 19 relevant également du chapitre relatif aux emplois lucratifs, on remarque l’insertion d’une expression différente : « résidant régulièrement ». Cette distinction n’est pas sans conséquence puisque pourrait s’en déduire l’hypothèse que la présence physique et stable des réfugiés n’est pas nécessairement requise dans le cas de l’article 18, le verbe « se trouver » se définissant par le fait de se situer dans un lieu donné. Au contraire avec le verbe « résider », qui a pour synonyme le verbe « habiter » et dont on trouve une définition juridique, se dégage l’idée d’une présence physique durable et déterminée en un lieu précis. C’est donc une conception plus souple qui est retenue à l’article 18.
Les étrangers stricto sensu ne bénéficient pas de la liberté d’entrée et de séjour. Ils sont assujettis à un visa d’entrée et à une attestation d’accueil (article L. 211-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile)27. L’article 15 de l’ordonnance du 2 novembre 1945 leur octroyait un droit au séjour28. Depuis 2004, ces conditions sont réglées par le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile29 et conformément aux articles L. 314-1 et L. 314-11, les réfugiés se voient délivrer de plein droit une carte de résident valable 10 ans30. Cette carte est également délivrée au conjoint du réfugié et à ses enfants de moins de 19 ans qui n’ont pas eux-mêmes la qualité de réfugié (articles L.314-9 et L.314-11 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile). Cette carte de résident31 « confère à son titulaire le droit d’exercer, sur ce territoire, la profession de son choix, dans le cadre de la législation en vigueur » (article L. 314-4 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile)32. Le droit au travail des réfugiés n’est donc pas subordonné à la délivrance préalable d’un titre de travail, la carte vaut autorisation de travail33. En conséquence, le traitement réservé aux réfugiés se distingue de celui des étrangers stricto sensu en étant plus favorable. Une limite vient néanmoins rappeler l’absence d’assimilation avec le régime des nationaux : la carte de résident peut être refusée si la présence du réfugié constitue une menace pour l’ordre public (article L. 314-3 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile). La prise en considération de l’ordre public34 a d’ailleurs été intégrée à l’article 2 de la Convention de Genève de 1951.
Il convient à présent de s’intéresser non plus aux conditions préalables à remplir, mais au droit des réfugiés d’exercer une profession non salariée dans les domaines de « l’agriculture, l’industrie, l’artisanat et le commerce, ainsi que la création de sociétés commerciales et industrielles ».

II – La jouissance de l’exercice des professions non salariées : un traitement favorable non constitutif d’une assimilation des étrangers bénéficiaires d’une protection internationale

En théorie, plusieurs instruments internationaux énoncent une égalité de traitement entre les étrangers et les nationaux35. En pratique, cette conception idéaliste de l’assimilation subit n’est pas réalisée dans la mesure où des exigences préalables plus strictes doivent être remplies par les étrangers. L’exercice d’une activité professionnelle est gouverné par des régimes distincts dans la Convention selon qu’il s’agit des professions salariées régies par l’article 17 ou des « professions non salariées ». Cette expression, à la fois contenue dans l’article et constituant son titre, signifie que les salariés ne sont pas  placés dans un état de subordination juridique par rapport à un donneur d’ordre. Ils exercent leur activité en toute indépendance, sans contrat de travail. Si les étrangers exerçant une profession non salariée sont moins nombreux par rapport aux étrangers salariés, ils « occupent une place de choix, dans la mesure où ils sont appelés à demeurer plus longtemps, et donc à s’intégrer plus facilement dans la société française, ne serait-ce que par la place qu’occupera leur entreprise dans la vie économique »36. Exceptées les professions libérales traitées à l’article 19, on retrouve ici les trois catégories d’activités indépendantes répertoriées par le droit interne : les activités « agricoles, artisanales, industrielles et commerciales »37. En relation avec ces domaines, l’article mentionne également la création de « sociétés commerciales et industrielles ». L’article 18  n’innove pas en se référant expressément à l’exercice des activités artisanales, commerciales et industrielles. « Cette constante qui résulte sans doute des nécessités du commerce international, révèle une attitude tout à fait favorable aux étrangers relevant du droit conventionnel et désirant exercer une profession commerciale »38. Il est plus rare en revanche que les activités agricoles soient explicitement mentionnées. La détermination de la nature de l’activité n’est pas accessoire puisqu’elle permet de délimiter le régime juridique applicable. Le principe qui prévaut en droit interne est celui de la liberté du commerce et de l’industrie depuis le décret d’Allarde des 2 et 17 mars 1791. Ce principe va se heurter aux conséquences de la crise économique dans les années 1930 et deux éléments vont venir conditionner le droit pour un étranger d’exercer une profession non salariée : la première condition de réciprocité exige qu’un français puisse bénéficier d’un traitement équivalent dans le pays dont est originaire l’étranger ; la seconde condition a été posée par le décret-loi du 12 novembre 1938 et consiste en l’obtention d’une carte d’identité spéciale délivrée par l’autorité préfectorale39. Les règles relatives à l’exercice d’une activité non salariée ont été assouplies depuis la loi du 24 juillet 2006. Désormais, aux termes de l’article L. 313-10-2 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, un ressortissant de nationalité étrangère qui souhaite exercer en France une activité commerciale, industrielle ou artisanale doit détenir une carte de séjour temporaire autorisant l’exercice d’une activité professionnelle. Cette carte doit mentionner l’activité concernée40. Le régime juridique applicable aux réfugiés est préférentiel par rapport aux autres étrangers, puisque titulaires d’une carte de résident, ils sont dispensés de l’obligation de carte de séjour temporaire41.

Lors des travaux préparatoires de la Convention de Genève, l’insertion de la clause à l’article 18 d’un « traitement aussi favorable que possible et en tout cas un traitement non moins favorable que celui accordé dans les mêmes circonstances aux étrangers en général » a suscité d’ardentes discussions42. Une telle clause vise a priori à prévenir tout franchissement d’un seuil minimal de protection qui nuirait à la pleine effectivité des droits reconnus aux réfugiés par la Convention de Genève du 28 juillet 1951. Nonobstant, a contrario des articles 15 relatif aux associations et syndicats professionnels et 17 relatif à l’exercice d’une profession salariée qui prévoient le traitement de la nation la plus favorisée, ou bien encore des articles 4 relatif à la liberté de religion, 14 sur la propriété industrielle, littéraire, artistique et scientifique, 16 relatif à l’accès aux tribunaux et 24 sur la législation du travail et la sécurité sociale régis par une clause d’assimilation, cette clause d’un « traitement aussi favorable que possible et en tout cas un traitement non moins favorable » constitue une atténuation incontestable au caractère protecteur de la Convention de 1951. Il incombe ainsi aux États une obligation de moyen : ils doivent faire de leur mieux pour garantir les droits des réfugiés qui ne doivent pas être en deçà de ceux des étrangers en général. La clause n’est donc pas aussi bénéfique pour les réfugiés que celle présente à l’article 24 consacrant de manière explicite « l’égalité de traitement entre les réfugiés et les nationaux » en matière de sécurité sociale.
Les réfugiés bénéficient d’une protection internationale substantielle consacrée dans la Charte du 28 juillet 1951. Le traitement qui leur est accordé dans l’exercice de professions non salariées est favorable dans la mesure où ils échappent à la rigueur des conditions imposées aux étrangers stricto sensu. S’ils font figure d’étrangers sui generis au sein de cette dernière catégorie, la délivrance d’une carte de résident de dix ans accordée de plein droit valant autorisation de travail donne seulement naissance à un rapprochement de leur statut avec celui des nationaux, et non à une pleine assimilation.

Comme l’écrivait André Weiss au début du XXème siècle,  : « S’il est pour l’homme un droit naturel après celui de vivre, c’est assurément celui de chercher dans son travail, dans l’exercice d’un commerce, d’une industrie, d’une profession quelconque, les ressources indispensables à sa subsistance et à celle de sa famille. Ce droit appartient aux étrangers en France, comme il appartient aux Français ; il ne pourrait, sans une odieuse tyrannie, leur être entièrement refusé »43.

 

1 Convention du 28 octobre 1933 relative aux réfugiés russes et arméniens et Convention du 10 février 1938 liée aux réfugiés en provenance d’Allemagne et aux réfugiés espagnols.

2 Forum Réfugiés, L’asile en France et en Europe, État des lieux 2006, la France ne doit pas laisser filer le droit d’asile, IVème Rapport annuel, juin 2006, p. 98.

3 Les principes de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 ont été incorporés au droit interne français par la loi du 25 juillet 1952, laquelle institue un organe administratif : l’Office français de protection des réfugiés et apatrides.

4 Article 26 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 : « tout traité en vigueur lie les Parties et doit être exécuté de bonne foi », voir ZIMMERMANN A., The 1951 Convention Relating to the Status of Refugees and its 1967 Protocol: a commentary, Oxford, New York, Oxford University Press, Collection Oxford commentaries on international law, 2011, pp. 976.

6 Article 23 de la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 : « Toute personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage » ; Alinéa 5 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 : « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi ».

7 Si des demandeurs d’asile sont éligibles au statut de réfugié, d’autres en sont expressément exclus lorsque ces personnes ont commis des crimes graves de droit commun, des crimes contre l’humanité ou des agissements contraires aux buts et principes onusiens (Section F de l’article 1er). Dans le même sens, la protection liée aux droits attachés au statut de réfugié cessera dès lors que les motifs justifiant cette qualité disparaîtront. Dans l’acception générale, il est établi que ce statut a une nature provisoire, subsidiaire comme en témoigne la section C de l’article 1er de la Convention. La cessation n’emporte pas de conséquences rétroactives.

8 ALLAND D., Droit d’asile et des réfugiés, Colloque de Caen, SFDI, Editions Pedone, 1997, p. 63.

9 Eu égard à l’exercice d’une activité professionnelle, cette distinction emporte des conséquences juridiques puisque durant l’instruction de sa demande, le demandeur d’asile dans le droit interne ne peut exercer d’activité dans un délai d’un an.

10 Si des demandeurs d’asile sont éligibles au statut de réfugié, d’autres en sont expressément exclus lorsqu’ils ont commis des crimes graves de droit commun, des crimes contre l’humanité ou des agissements contraires aux buts et principes onusiens (Section F de l’article 1er). Dans le même sens, la protection liée aux droits attachés au statut de réfugié cessera dès lors que les motifs justifiant cette qualité disparaîtront. Dans l’acception générale, il est établi que ce statut a une nature provisoire, subsidiaire comme en témoigne la section C de l’article 1er de la Convention. La cessation n’emporte pas de conséquences rétroactives.

11 Il y a parmi les autres fondements : l’asile constitutionnel en application de l’alinéa 4 du Préambule de la Constitution de 1946, le mandat du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) sur la base des articles 6 et 7 de son statut et le bénéfice de la protection subsidiaire introduite dans le droit français par la loi du 10 décembre 2003.

12 Dans la doctrine, la définition du concept de « réfugié » a été précisée par le professeur  Mario Bettati : « le  mot  réfugié  désigne  en  droit  international  toute  personne  qui  a cherché  refuge,  c’est-à-dire  abri  contre  une  poursuite  ou  un   danger  physique,  dans l’ambassade ou sur le territoire d’un État autre que celui dont il est ressortissant », in BETTATI M., L’asile politique en question, PUF, Paris, 1985, p. 79. Au regard de la définition conventionnelle, cinq motifs conditionnent la reconnaissance du statut de réfugié (« race, religion, nationalité, appartenance à un certain groupe social, opinions politiques. La protection accordée au réfugié s’appuie à la fois sur un élément subjectif (la crainte de persécution) et un élément objectif (« avec raison »). Résulte de cette définition, une appréciation au cas par cas, individuelle. Les limites temporelle et géographique posées par la Convention ont été levées par le Protocole additionnel du 31 janvier 1967. Les critères conventionnels de la définition du réfugié ne bénéficient pas d’une interprétation uniforme par les États. La nécessité d’une harmonisation du statut de réfugié a aboutie à une définition du réfugié en droit communautaire Directive du 29 avril 2004 (2004/83/CE). En 1979, le Haut Commissariat pour les réfugiés a édité un guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié allant déjà dans le sens d’une interprétation plus convergente entre les États. Sur cette définition pourront être consultés différents articles : CAVAILLE J.-P., « Persécution, une notion dans la longue durée », Les Dossiers du Grihl, mis en ligne le 28 février 2010, consulté le 5 janvier 2015. URL : dossiersgrihl.revues.org/3892 ; VALLUY J., « La fiction juridique de l’asile, Revue Plein droit n° 63, décembre 2004, consulté le 25 janvier 2015,  URL www.gisti.org/doc/plein-droit/63/fiction.html ; PESTRE E., L’État, le réfugié et son thérapeute. Les conditions de vie psychique des réfugiés, Thèse de Doctorat, Université Denis Diderot - Paris 7, soutenue le 23 juin 2007, 523 p. ; de HEMPTINNE J., « Controverses relatives à la définition du crime de persécution », Revue Trimestrielle des Droits de l’Homme, 2003, pp. 15-48. Accessible en ligne : www.rtdh.eu/pdf/200315.pdf ; GOY R., « La jurisprudence française sur la qualité de réfugié », Annuaire français de droit international, volume 7, 1961, pp. 943-957.
Si la Convention innove en consacrant une définition du réfugié à l’article 1 A2, son mutisme sur la définition de l’asile pose des difficultés. Le vide juridique est comblé par une interprétation plutôt dérogatoire et non axiologique. Le droit d’asile est proclamé à l’article 14 de la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 sous la formulation singulière  de « droit de rechercher asile ». Il est reconnu comme un droit fondamental dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 7 décembre 2000 ainsi que dans une décision du Conseil Constitutionnel en date du 13 août 1993. Il faut distinguer entre le droit objectif, le droit d’asile et le droit subjectif, le droit à l’asile.

13 Eu égard à cette remarque, il est essentiel de se remémorer les finalités antinomiques du droit des étrangers et du droit d’asile. Le premier entretient une logique protectrice alors que le second se caractérise par une logique de contrôle.

14 Formule empruntée à l’article 30 de la loi française n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile fait de l’accès à l’emploi et au logement une priorité pour les bénéficiaires d’une protection internationale. Sur cette base légale en faveur des bénéficiaires d’une protection internationale, des appels à projets relatifs à des actions d’aide d’accès à l’emploi et au logement sont régulièrement lancés.

15 Le droit des étrangers est apparu sur le devant de la scène juridique dans les années 1970. Il s’agit d’un droit empirique, fragmentaire. Dans les années 1990, le droit des étrangers s’est substitué au droit de l’immigration, discipline qui se cristallisait autour « des règles juridiques concernant les situations et activités par lesquelles se réalise une insertion de l’étranger dans la société », in RICHER L., Droit de l’immigration,  Editions PUF, 1986.

16 En droit interne, la définition de l’étranger est précisée à l’article L 111-1 du  Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « sont considérés comme étrangers (…) les personnes qui n’ont pas la nationalité française, soient qu’elles aient une nationalité étrangère, soient qu’elles n’aient pas de nationalité ».

17 ANDRIANTSIMBAZOVINA J., GAUDIN H., MARGUENAUD J.-P., RIALS S., SUDRE F., Dictionnaire des droits de l’homme, Editions PUF, 2008, p 408.

18 COURNIL C., Le statut interne de l’étranger et les normes supranationales, Editions Harmattan, 2005, p 24.

19 Ibid., p 24.

20 Article 2 du Pacte des Nations Unies sur les droits économiques sociaux et culturels du 16 décembre 1966 ; Article 2 de la Convention du 7 mars 1966 sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

21 Article 3 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951.

22 LOSCHAK D., L’étranger et les droits de l’homme, Mélanges Charlier, 1981, p 617.

23 VANDENDRIESSCHE X., Le droit des étrangers, 5ème Edition Dalloz, 2012, p 2.

24 Op. cit. , COURNIL C., Le statut interne de l’étranger et les normes supranationales, p. 21.

25 La citoyenneté européenne résulte du Traité de Maastricht de février 1992 entré en vigueur en 1993. La Cour de Justice en a fait une interprétation optimale dans l’arrêt Grzelczyk du 20 septembre 2001.

26 Voir l’Accord signé à Porto le 2 mai 1992.

27 L’irrégularité de l’entrée ou du séjour irrégulier est sanctionnée par un an d’emprisonnement et 3750 euros d’amende (article L.621-1et L.621-2).

28 Elle a subi de nombreuses modifications : Loi Bonnet du 10 janvier 1980, Loi Questiaux du 29 octobre 1981, Loi Dufoix du 17 juillet 1984, Loi Pasqua du 9 septembre 1986, Lois Joxe du 10 janvier 1990, Loi Quilès du 6 juillet 1992, Lois Pasqua du 24 août et du 30 décembre 1993, Lois Debré du 27 décembre 1994 et du 24 avril 1997, Loi Chevènement du 11 mai 1998, Loi Sarkozy du 24 novembre 2004.

29 Si l’éligibilité au statut de réfugié est accordée par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides un récépissé de 3 mois renouvelable, portant la mention « Reconnu réfugié » est remis. Après présentation des documents d’état civil élaborés, la préfecture délivre un autre récépissé avec la mention « A demandé la délivrance d’un premier titre de séjour ». Ce récépissé, d’une durée de 3 mois, sera renouvelé jusqu’à la remise définitive de la carte de résident. L’accès au marché du travail est autorisé dès l’obtention du premier récépissé.

30 En sont exclus les ressortissants étrangers en état de polygamie, aux conjoints des ressortissants (Art. L. 314-5 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile), et ceux qui quittent le territoire français sauf autorisation pendant une période de plus de 3 ans (art. L.314-7 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile).

31 Elle ne doit pas être confondue avec la carte de résident de longue durée, un titre de séjour reflétant la volonté d’un statut européen commun à tous les ressortissants de pays tiers installés légalement et durablement sur le territoire de l’Union.

32 Dans l’attente de l’instruction de leurs demandes d’asile, les réfugiés candidats ne sont pas contraints aux documents requis en principe pour l’entrée sur le territoire français (Article L. 741-3 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile). L’autorité préfectorale leur délivre une attestation de demande d’asile, laquelle n’ouvre pas un droit au travail pour les réfugiés candidats. Exceptionnellement, le droit d’exercer une activité est autorisé dans le cas où l’Office français de protection des réfugiés et apatrides n’a pas statué sur la demande d’asile déposé dans un délai d’un an.

33 Arrêt du Conseil d’État du 3 octobre 1990, Office national d’immigration.

34 L’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme du 4 novembre 1950 donne une définition de la notion d’ordre public. Les considérations de sauvegarde de l’ordre public ont valeur constitutionnelle Décision  n° 2003-484 du 20 novembre 2003 du Conseil Constitutionnel. Sur cette question, consulter JULIEN-LAFERRIERE F., « Ordre public et droit des étrangers », in REDOR M.-J., L’ordre public : ordre public ou ordres publics. Ordre public et droits fondamentaux, Editions Bruylant, 2001.

35 La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789  proclame en ce sens : « Les hommes naissent libres et égaux en droits ». Le droit pour la personne humaine d’accéder à une activité professionnelle est encore affirmé dans la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 et dans la Convention des Nations Unies du 7 mars 1996 sur l’élimination de toutes formes de discrimination raciale. Le droit d’exercer une activité lucrative sur le territoire d’un État qui n’est pas celui d’origine de l’étranger est inscrit dans la Charte sociale européenne du 18 octobre 1961 ainsi que dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels du 19 décembre 1966.

36 MORANCAIS-DEMEESTER M.-L., Les droits professionnels des étrangers non-salariés en France, Thèse de Doctorat, Université Paris II, 1984, pp. 9-10.

37 L’article L 121-1 du Code de commerce détermine les activités commerciales. La définition juridique des activités agricoles est précisée à l’article L311-1 du Code Rural. Enfin l’entreprise artisanale est définie par la loi du 5 juillet 1996.

38 Op. cit.,  MORANCAIS-DEMEESTER M.-L., p 184.

39 Les ressortissants des États membres de l’Union européenne sont exclus de ce dispositif puisqu’ils bénéficient de la liberté d’établissement avec le Traité de Rome du 25 mars 1957.

40 Plusieurs justifications doivent accompagner la demande d’une autorisation de séjour comme l’attestation d’une activité viable sur le plan économique, d’une activité compatible avec la sécurité, la salubrité et la tranquillité publique, l’absence de condamnation ou d’interdiction d’exercice.

41 En sont également dispensés les ressortissants de l’Espace économique européen, de l’Union européenne, de l’Espace économique européen, de la Suisse, mais aussi des principautés de Monaco, d’Andorre et de la République de Saint-Marin, lesquels bénéficient de la liberté d’établissement. Sont aussi concernées par cette dispense les personnes résidant déjà en France et titulaires d’une carte de résident mention « résident de longue durée -CE », d’une carte de résidence algérien (CRA) de 10 ans, d’un certificat de résidence algérien  mention « vie privée et familiale », ou d’une carte de séjour temporaire (CST) mention « vie privée et familiale » ou « compétences et talents ».

42 C’est d’ailleurs par rapport à cette clause qu’une réserve a été émise par l’Angola en date du 4 novembre 2008 arguant que le traitement résultant du régime de Genève doit être en conformité avec les dispositions légales et constitutionnelles et ne doit pas conduire à un traitement plus favorable pour les réfugiés par rapport aux nationaux. « This réservation provides that the provision is to be read in compliance with the reserving State’s constitutional and legal provisions and that it must not provide more favourable treatment for refugees than nationals », in ZIMMERMANN A., (dir.), The 1951 Convention Relating to the Status of Refugees and its 1967 Protocol: a commentary, Oxford, New York, Oxford University Press, Collection Oxford commentaries on international law, 2011, pp. 975.

43 WEISS A., Traité théorique et pratique de droit international privé, Tome II, 2ème édition, Paris 1908.


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  • The rights of refugees under international law
  • Asylum and integration in member states of the EU: integration of recognized refugee families as defined by the Geneva Convention considering their status with respect to the law of residence
  • Traité du droit de l'asile
  • Convention relating to the status of refugees : its history, contents and interpretation : a commentary

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  • Rights of Refugees in the Context of Integration : Legal Standards and Recommendations
  • A comparative Study of social and economic Rights of Asylum Seekers and Refugees in the United States and the United Kingdom